La gestion alternative
La gestion alternative désigne un ensemble très varié de méthodes ou plutôt de stratégies de gestion d'actifs spécialisées, techniques et concentrées sur une niche de marché bien précise. La gestion alternative se donne pour objectifs d'atteindre un niveau de performance absolue, de préférence stable, décorrélée de la tendance globale du marché, tout en minimisant les risques et en garantissant le capital investi. Nous verrons plus bas des exemples de stratégies de gestion alternative.
Les outils de la gestion alternative
La vente à découvert (selling short) consiste à vendre des titres que l'on ne détient pas, en espérant les racheter moins cher ultérieurement. Pour ce faire, le gérant emprunte ces mêmes titres sur la période. (En effet, lors d'un prêt de titres il y a transfert de propriété vers l'emprunteur, si bien que celui-ci a le droit de les vendre ; il lui faut seulement faire en sorte d'avoir racheté les titres au moment où il doit les rendre !)
L'arbitrage consiste à exploiter des écarts de prix injustifiés, par exemple en achetant des obligations convertibles supposées sous-évaluées tout en vendant à découvert l'action sous-jacente.
La recherche de l'effet de levier (« leverage ») consiste à emprunter du cash pour augmenter la taille effective du portefeuille (constitué au départ seulement des fonds apportés par les investisseurs).
Le recours aux produits dérivés : options, futures ou contrats de gré à gré est fréquent, soit dans un but spéculatif, soit au contraire pour couvrir le portefeuille.
La gestion alternative s'appuie aussi sur la recherche et l'analyse micro ou macro économique, qui doit permettre de trouver des opportunités soit dans les tendances de fond de l'économie ou des marchés financiers, soit en identifiant des entreprises à fort potentiel ou au contraire en difficulté.
Les stratégies
Les différentes stratégies se caractérisent par des ratios rendement / risque très variables. Il existe de nombreuses présentations des différentes stratégies alternatives. Se reporter par exemple au site http://www.magnum.com/
Arbitrage de convertible (convertible arbitrage) : investit dans les obligations convertibles mal cotées sur le marché. Typiquement, cette stratégie consiste à acheter l'obligation convertible, tout en vendant l'action sous-jacente à découvert.
Sélection de titres (Long short Equity) : consiste à prendre des positions aussi bien longues (acheteuses) que courtes (vendeuses) sur des actions sélectionnées appartenant au même secteur ou à la même zone géographique, avec une position nette résultante plutôt longue (long bias), ou plutôt vendeuse (short bias), ou neutre (market neutral). Nécessite de bien maîtriser les outils de sélection des titres (stock picking).
Macro / opportuniste (global macro) : tente de tirer profit des évolutions de l'économie globale, en particulier les évolutions de taux dues suite aux politiques économiques de gouvernements. Utilise les instruments reflétant la situation éconoique mondiale : devises, indices, courbes de taux, matières premières...
Arbitrage sur produits de taux (fixed income arbitrage) : cherche à tirer profit des mouvements et des déformations de la courbe des taux. Utilise comme véhicules les titres d'Etat, les futures et les swaps de taux.
Arbitrage sur fusions-acquisitions (merger arbitrage) : la possibilité d'arbitrage dans ce genre de situations (OPA, OPE) résulte de l'écart entre le prix annoncé par l'acquéreur et le prix auquel la cible se traite sur le marché.
Situations spéciales (event driven) : le gestionnaire recherche les opportunités générés par des événements intervenant dans la vie des entreprises : filialisation, fusions, ou des difficultés (distressed securities)
Marchés émergents (emerging markets) : investit dans les marchés en développement. Stratégie très risquée car les instruments de couverture ne sont pas toujours disponibles sur ce type de marché.
Etc, etc…
Les Hedge funds
Un hedge fund ou fonds alternatif est un organisme de gestion collective, fonctionnant sur le même principe que les OPCVM ou Mutual funds américains, mais investi dans une stratégie alternative. Contrairement aux fonds « classiques », les hedge funds obtiennent des performances généralement déconnectées de la tendance générale des marchés actions ou obligations.
Remarque : to hedge signifie couvrir une position en prenant une autre position symétrique. Ceci ne signifie pas pour autant que tous les hedge funds pratiquent des stratégies « sans risque » ; cela ne leur permettrait pas d'obtenir les performances dont ils se targuent.
Le métier des hedge funds est très technique et spécialisé, pratiqué généralement par des gérants expérimentés, indépendants et dont la fortune personnelle est souvent pour partie engagée dans le fonds. Les gérants sont généralement rémunérés sur les performances du fond.
Du fait de la non diversification des portefeuilles (choix d'une stratégie unique) et du recours éventuellement massif aux produits dérivés, les hedge funds échappent aux catégories traditionnelles de Mutual funds. C'est donc aussi un métier peu régulé : les hedge funds sont développés aux Etats-Unis et dans les zones dites « offshore ». Un hedge fund se spécialise généralement dans une stratégie alternative précise, c'est pourquoi il en existe autant de sortes que de stratégies alternatives.
Les hedge funds attirent des investisseurs fortunés et avisés, par les perspectives de résultats qu'ils offrent, quelle que soit la tendance globale des marchés.
Les fonds de fonds alternatifs
On attend d'un hedge fund qu'il se spécialise sur une stratégie et s'y tienne avec constance : c'est une question de transparence, et un des risques lié à l'investissement dans les hedge fund est justement un changement de style de gestion non avoué (« style drift »), si la stratégie annoncée au départ n'apporte pas les résultats escomptés.
Les performances des hedge funds sont très variables ; d'autre part la volatilité étant souvent élevée, l'investisseur peut souhaiter se porter vers un fonds offrant des perspectives à long terme moins avantageuses, mais avec plus de stabilité, ce qui lui permet de sortir à tout moment du fonds.
C'est pourquoi les fonds de fonds alternatifs ont été créés. Les capitaux collectés sont investis par le gérant dans un éventail de fonds alternatifs, répartis sur toutes les stratégies connues. Contrairement à ce qu'on pourrait croire il ne s'agit pas seulement de créer une sorte de « melting pot » de fonds, puis de laisser faire les gérants de chaque fonds. Un véritable travail de recherche et d'ingéniérie financière est requis pour sélectionner les gérants, évaluer les risques et choisir la répartition des actifs entre les différents fonds.
Une caractéristique de la courbe de rendement d'un fonds de fonds alternatif, par rapport à la courbe de croissance du marché, est que le fonds de fonds ne « prend » jamais toute la hausse en période de croissance, mais limite la baisse au capital investi dans les périodes de crise.
Ailleurs sur le Web
Jusqu'à il y a peu, on ne trouvait pas de ressources francophones didactiques dignes d'intérêt sur le web concernant les hedge funds, sauf évidemment Fimarkets! La Banque de France vient de remédier à cela en publiant une "somme" sur le sujet, sous forme d'un numéro complet de la très sérieuse "Revue de la stabilité financière". Ce Numéro spécial hedge funds est téléchargeable gratuitement sur le site de la BdF.
On trouvera également des articles en anglais fort intéressants sur les sites suivants:
- The hedge funds association: http://www.hedgefundassoc.org/
- HedgeCo.net: http://www.hedgeco.net/
- Magnum funds: http://www.magnum.com/