Le rôle des marchés financiers

Cette page est soutenue par Talan Finance, conseil, maîtrise d'ouvrage et ingénierie logicielle au coeur des marchés financiers.

La fonction du marché financier dans l'économie

Un marché est le lieu où se rencontrent une offre et une demande d'un certain bien. En l'occurrence le bien dont il s'agit est l'argent.

Sur le marché des capitaux, les détenteurs de l'offre sont les agents dits "à capacité d'épargne positive", en l'occurrence les ménages essentiellement (aussi surprenant que cela puisse paraître !) et aussi les entreprises, quoique celles-ci préfèrent généralement réincorporer leurs bénéfices dans leur propre activité ou distribuer des dividendes à leurs actionnaires. Les demandeurs sont d'une part les Etats, l'Etat providence moderne nécessitant des investissements considérables et d'autre part bien sûr les entreprises : ce sont les agents que l'on appelle "à besoin de financement".

Loin d'une entité abstraite et souvent présentée comme irrationnelle et toute-puissante à la fois, le marché des capitaux représente en fait le moteur de l'économie, puisque c'est le lieu où le carburant, l'argent, va être utilisé pour propulser de l'avant la machine, c'est-à-dire produire des richesses.

Tel est le principe, mais l'application pratique présente des modalités évidemment plus complexes.

La première pierre d'achoppement réside dans la possibilité qu'un échange ait effectivement lieu entre les agents à capacité de d'épargne et les agents à besoin de financement. En effet pour que le marché fonctionne il faut non seulement que le bien, l'offre et la demande existent, mais aussi que les agents aient envie de procéder à l'échange ! Or les agents à capacité d'épargne, les ménages rappelons-le, présentent une profonde aversion pour le risque. Aversion d'ailleurs justifiée par le sens commun, tout manuel du parfait boursicoteur qui se respecte commence par un avertissement enjoignant le lecteur de ne placer directement en Bourse que son superflu, c'est-à-dire ce dont il n'a pas besoin aujourd'hui et n'aura pas besoin demain. Dès lors l'essentiel de l'épargne dégagée par les ménages se trouve en dépôt sur des comptes à vue ou des comptes d'épargne où l'argent est immédiatement disponible.

En face, les agents à besoin de financement, à savoir les entreprises, souhaitent trouver des financements à long terme pour planifier leur développement. L'horizon des agents à capacité d'épargne est généralement de quelques semaines (la prochaine paie) à quelques mois (le prochain tiers provisionnel…). L'horizon des agents à besoin de financement est de plusieurs années ! Cette différence rend l'échange effectif quelque peu problématique.

Les banques

Façade de banque

C'est ici qu'intervient une troisième catégorie d'agents économiques : les banques. Les banques sont les seuls agents qui possèdent le pouvoir de transformer des ressources à très court terme : les dépôts à vue (les comptes courants) en emplois à moyen ou long terme : le crédit bancaire. Les banques établissent donc le pont nécessaire entre les ménages et les entreprises ; historiquement elles ont joué et jouent toujours un rôle essentiel dans le financement de l'économie.

Chaque banque a le droit de distribuer sous forme de crédit la quasi-totalité de l'argent (mais pas tout ! cf. plus bas) mis en dépôt par ses clients sur les comptes à vue. Mais ce crédit distribué par la banque n'annule pas pour autant le dépôt, qui reste disponible pour le client. Il y a donc création de monnaie par la banque. Ces crédits, octroyés sous forme de dépôts à vue, viennent grossir l'encaisse des banques et donc leur possibilité de distribuer de nouveaux crédits, etc. Les dépôts font les crédits, qui eux-mêmes font les dépôts, …etc. C'est ce qu'on appelle le "multiplicateur du crédit".

Le pouvoir de création monétaire des banques n'est évidemment, et heureusement, pas infini. Il est limité d'abord par le fait qu'une partie seulement du crédit octroyé restera sous forme de dépôt. Le reste sera converti en monnaie fiduciaire (billets) par des retraits . C'est d'ailleurs pour garantir la capacité des banques à faire face aux retraits que la banque centrale leur impose de bloquer un pourcentage de leurs dépôts sous forme de réserves obligatoires, non utilisables pour distribuer du crédit. Ce taux de réserves obligatoires est un des instruments de contrôle par les banques centrales de la quantité de monnaie en circulation.

De plus, une entreprise ne peut pas se financer uniquement par le crédit : au-delà d'un certain niveau d'endettement, les frais financiers finissent par pénaliser de manière insupportable les résultats et à ce moment les banques n'acceptent plus de prêter. Les entreprises doivent aussi trouver des moyens de financement à encore plus long terme, des financements qui en fait ne deviennent exigibles qu'en cas de dissolution de la société : des capitaux, ou à très longue échéance, des emprunts obligataires par exemple. L'ensemble des capitaux et des dettes à long terme constituent ce qu'on appelle les fonds propres d'une entreprise.

Les banques, en particulier les banques d'affaires, interviennent aussi dans le financement à long terme des entreprises, mais ce n'est pas leur vocation première qui est plutôt de faire circuler l'argent. Pour doter les entreprises en fonds propres, il faut des agents économiques prêts à immobiliser de fortes sommes sur de longues périodes, en vue bien évidemment d'en retirer un bénéfice : des investisseurs.

Les investisseurs institutionnels

Les principaux investisseurs sur les marchés de capitaux aujourd'hui sont ceux qu'on appelle les "investisseurs institutionnels" (familièrement les "zinzins"), à savoir les compagnies d'assurance, les gérants de fonds (asset managers), les caisses de retraite et leur équivalent américain les fonds de pension. Eux aussi drainent de l'épargne publique, mais cette épargne est immobilisée et n'est pas exigible immédiatement comme les sommes en dépôt sur les comptes à vue. D'autre part les organismes en question ont généralement une obligation réglementaire ou contractuelle ou statutaire de faire fructifier cette épargne afin de pouvoir verser dans le cas des compagnies d'assurance les indemnités, dans le cas des fonds de pension les retraites à leurs souscripteurs.

Au lieu de distribuer du crédit comme les banques, les investisseurs institutionnels achètent les titres émis par les entreprises en quête de financement. Ces titres sont représentatifs soit de capitaux propres : les actions, soit de dettes à long terme : les obligations. Cet achat s'effectue soit sur le marché primaire, c'est-à-dire dès l'émission du titre, soit sur le marché secondaire, qu'on appelle plus communément "la Bourse".

Entre la décision des entreprises de trouver des financements sur le marché d'une part, et la décision des investisseurs institutionnels de placer l'épargne dont ils ont la garde d'autre part, il y a clairement cette fois une offre et une demande qui ne peuvent que se rencontrer. Encore faut-il que le marché s'organise pour faciliter au mieux cette rencontre ; plusieurs sortes d'acteurs vont y contribuer. A ce niveau les banques manifestent de nouveau leur présence en force, car en tant qu'organismes teneurs de comptes espèces et pourvoyeurs de liquidité, elles vont jouer un rôle d'intermédiation primordial.

L'émission des titres

L'émetteur qui souhaite se financer sur le marché se tourne vers une banque, ou un groupe de banques (le "syndicat") qui joue le rôle d'agent pour cette émission. L'agent prend en charge toutes les modalités économiques de l'émission. Il s'engage à "prendre ferme", en d'autres termes à acheter les titres émis, à charge à lui de trouver ensuite des investisseurs prêts à les racheter.

Après l'émission, et une fois les titres sur le marché, l'agent payeur de l'émetteur (qui peut être le même que l'agent financier ou un autre établissement) aura en charge le bon déroulement de toutes les opérations intervenant dans la vie du titre : paiement de coupons pour les obligations ou de dividendes pour les actions, remboursements, augmentations de capital…

Les agences de notation enfin sont des établissements indépendants qui évaluent la qualité des émetteurs et leur attribuent une note établissant leur fiabilité en tant que débiteurs.

Les dépositaires

L'agent financier de l'émetteur gère la relation avec le dépositaire central, un acteur fondamental sur le marché des titres. Le dépositaire central tient à jour dans ses comptes, pour chaque émission dont il a connaissance, la quantité totale de titres émis et la quantité détenue par chaque établissement inscrit en compte chez lui (la somme des quantités détenues par chaque établissement devant bien évidemment égaler la quantité totale !). En France le dépositaire central de la quasi-totalité des émissions est Euroclear France.

Chaque adhérent à Euroclear France est un dépositaire local. Tout investisseur qui n'est pas directement inscrit en compte chez Euroclear France doit ouvrir un compte chez un dépositaire local pour pouvoir détenir des titres. Or le dépositaire central ne gère à peu près que les titres émis dans son propre pays, tandis que les investisseurs tendent à internationaliser leurs placements. D'où le développement de la fonction de "dépositaire global" ou "global custodian". Le global custodian est désigné par l'investisseur pour être son teneur de compte pour toutes ses opérations d'achat-vente de titres sur tous les marchés. Pour ce faire le global custodian se met en relation avec des dépositaires locaux sur tous les marchés de la terre, les dépositaires locaux ayant chacun en charge la relation avec le dépositaire central de leur pays.

Pour être global ou local custodian, il faut être habilité à tenir non seulement des comptes titres mais aussi des comptes espèces au nom des investisseurs. Ces établissements sont donc généralement des banques.

Les opérations de marché

Les investisseurs achètent des titres généralement par l'intermédiaire d'un broker ou courtier. Celui-ci assure plusieurs services en direction des investisseurs. Les analystes financiers étudient le marché, les émetteurs et prodiguent des recommandations. Les vendeurs répercutent les conseils des analystes en direction des investisseurs et recueillent leurs ordres. Les traders enfin vont sur le marché acheter ou vendre les titres.

La négociation entre les brokers se fait soit directement "de gré à gré", soit par l'intermédiaire d'un marché organisé, une Bourse des valeurs, soit sur une des places de marché électroniques qui connaissent un fort développement actuellement.

Une fois l'opération négociée, l'investisseur se tourne vers son dépositaire afin que celui-ci prenne en charge la partie "post-marché". En effet pour que l'opération soit dûment enregistrée il faut procéder à l'échange des titres fournis par le vendeur contre les espèces fournies par l'acheteur. C'est le règlement-livraison.

Le dépositaire aura également la charge de répercuter sur les comptes de son client investisseur l'impact des multiples opérations sur titres intervenant sur son portefeuille : paiements de coupons ou dividendes, remboursements, mais aussi détachement de droits de souscription, OPA, OPE…

Les salles de marché

Salle de marché

Les opérations de marché effectuées par les investisseurs institutionnels ne se bornent pas à l'achat-vente de titres. Étant données les sommes engagées, et la multiplicité des marchés où les investisseurs interviennent, cette activité génère des besoins annexes. L'investisseur doit se procurer des devises, d'où la nécessité d'intervenir sur le marché des changes. Il peut avoir également besoin de crédit, ou au contraire vouloir placer temporairement des liquidités, pour optimiser sa trésorerie. Enfin il veut protéger son portefeuille d'actifs contre les fluctuations du marché, d'où un besoin en produits dérivés.

Les entreprises non financières (les "corporates") font face au même type de besoins : les importateurs veulent se procurer des devises, les industries de transformation doivent se protéger contre les fluctuations des prix des matières premières. Tous ont des besoins de gestion de trésorerie, et de couverture contre les mouvements des cours ou des taux.

Les banques prennent en charge cette demande au niveau des agences pour les petites ou moyennes entreprises, ou directement au niveau de la salle des marchés pour les plus gros clients. Le cumul des positions générées sur les différents produits est alors pris en charge par les traders de la salle des marchés. L'activité d'une salle est d'abord déterminée par la somme des demandes de tous les clients de la banque !

La spéculation et l'arbitrage

Tendance haussière ou baissière
Parier contre la tendance actuelle du marché...

Tous les établissements financiers ainsi que des fonds dédiés à cette activité consacrent une partie de leurs ressources à la spéculation. Cette part de l'activité de marché, à la réputation sulfureuse, n'en est pas moins une nécessité. Spéculer c'est en effet prendre une position contraire à la tendance en cours : c'est se porter vendeur quand on pense que les cours vont baisser (et qu'ils sont donc au plus haut !), acheteur quand on pense qu'ils vont monter. En prenant position, les spéculateurs apportent de la liquidité au marché : ils sont les vendeurs des investisseurs qui veulent acheter, les acheteurs de ceux qui veulent vendre. C'est une activité risquée, puisque contrairement aux investisseurs ou aux corporates, les spéculateurs parient sur l'avenir.

Les arbitragistes jouent également un rôle d'harmonisation : ils profitent des différences de prix existant entre différents marchés pour faire des plus-values. Par exemple sur le marché des devises, ils achètent du dollar sur une place où celui-ci est moins cher et le revendent là où il est plus demandé, donc plus cher. C'est une activité sans risque, puisque les actifs achetés sont immédiatement revendus, mais qui nécessite des fonds importants dans la mesure où les plus-values par opération sont faibles . L'activité des arbitragistes a pour effet de gommer les incohérences du marché.

Conclusion

La littérature économique, après avoir opposé le financement des entreprises par le crédit bancaire (économie d'endettement) et le financement par l'émission de titres (économie de marché), tend désormais à leur attribuer des rôles complémentaires. Les études tendent à prouver que pour se développer une économie a besoin d'un marché financier actif et organisé et d'un système bancaire fiable.

L'objectif de ce site n'est pas de discuter du pourquoi des marchés financiers et de leur rôle néfaste ou bénéfique. Le contenu se focalise plutôt sur le comment : qui sont les acteurs, comment ils interagissent, les produits financiers qu'ils négocient, les fonctions autour desquelles ils s'organisent... et les réglementations auxquelles ils doivent se conformer.