La crise financière de 2008 dite des « Subprimes » a eu deux mérites : mettre l’accent sur les pratiques opaques de titrisation de dettes créées par les banques d’investissement et véritablement lancer l’application du volet risque opérationnel de Bâle II.

Puis l’éclatement de l’affaire Kerviel est venu apporter de l’eau au moulin des contempteurs des marchés pour une meilleure régulation de la « finance folle ». C’est donc tout naturellement que la gestion du risque opérationnel s’est concentrée sur les activités de marché.

Or, si le fait d’avoir titrisé des prêts hypothécaires à risque adjoints à des obligations d’états a provoqué le credit crunch, c’est-à-dire une crise de confiance qui pousse les banques à ne plus se prêter d’argent, il ne faut pas oublier que ce sont avant tout les banques de détail qui ont consenti ces prêts qui ont engendré cette crise. Pourtant, cinq ans plus tard, le risque opérationnel dans la banque de détail n’est toujours pas suffisamment maîtrisé, alors qu’il a pourtant été fortement réduit dans les banques d’investissements.

Le risque opérationnel a un impact direct sur le niveau de fonds propres exigé par les nouvelles réglementations. Il paraît donc important pour les institutions financières de toujours mieux maîtriser ce risque pour optimiser leur gestion de fonds propres.  Ce risque correspond au risque de pertes liées à une mauvaise adéquation ou à une défaillance humaine, à une défaillance des systèmes ou des procédures, ou encore des évènements externes, comme par exemple les risques climatiques, environnementaux…

Les réformes réglementaires ont ainsi obligé les banques à s’intéresser de plus près au risque opérationnel et à mettre en place en interne une politique de suivi de ce risque. Dans le cadre de nos activités de conseil, nous avons notamment accompagné de grandes banques d’investissement dans le design et la mise en place d’une solution innovante de monitoring du risque opérationnel. Cette approche a permis de consolider dans un système unique les process, les procédures détaillées et les plans de contrôles des équipes Opérations et d’assurer le suivi quotidien de ces plans de contrôles. L’un de ces établissements a souhaité étendre cette démarche de façon significative en déployant la gestion des risques opérationnels au Front-Office  ainsi qu’à l’ensemble des activités de la banque toutes géographies concernées,  afin d’obtenir une vision d’ensemble du risque opérationnel.

Si les banques ont fait un effort de structuration de leur dispositif de contrôle, il apparait toutefois que le niveau de maîtrise du risque opérationnel est inégal suivant les différentes lignes de métiers et qu’il pêche particulièrement dans le domaine de la banque de détail. Le rapport ORX (Operational Riskdata eXchange Association) de 2012 nous permet d’étudier l’évolution des pertes liées au risque opérationnel dans chaque ligne de métier. Cette base de données mondiale recense en effet toutes les pertes opérationnelles d’un montant supérieur à 20 000€ subies par les membres de l’association depuis janvier 2006. Actuellement, 67 grandes banques originaires de 21 pays différents participent à cette association, dont pour la France BNP Paribas, la Société Générale et Crédit Agricole SA.

Selon ce rapport, la banque de détail recense 18 218 millions d’euros de pertes brutes en 2011, ce qui correspond à 73,92% des pertes totales sur l’ensemble des métiers bancaires. La banque de détail est ainsi très loin devant le deuxième du classement, le métier « Trading & Sales », qui ne représente quant à lui que 8,53% des pertes constatées sur l’année 2011. Cette étude décompose également les pertes par type d’événements déclencheurs. Sur la période 2006-2010, c’est le risque « Clients, Products & Business Practices » qui contribue majoritairement aux pertes rencontrées, suivi avec une part bien plus faible par l’ « Execution, Delivery & Process Management » et l’ « External Fraud ». Dernier point à souligner concernant la banque de détail : la perte moyenne par événement est en augmentation très importante en 2011 par rapport aux années 2006-2010. La banque de détail présentait sur les années 2006-2010 un montant de perte moyen à de 210 558€, le plus faible du classement, alors qu’en 2011 elle atteint un montant moyen  de 801 025€, quasiment le plus important du classement.

Pour lutter contre le risque « Clients, Products & Business Practices » la banque de détail doit s’orienter vers plus de standardisation de ses processus Front Office. Elle peut s’inspirer des pratiques de contrôle des risques opérationnels qui ont été mises en place sur le Front Office des banques d’affaires : cartographier l’ensemble des risques, établir des indicateurs de risque pour chaque transaction en complément des covenants, faire un suivi des limites de mandats lors de chaque transaction… .

Dans un contexte économique où les défaillances d’entreprises ne cessent d’augmenter, l’exposition au risque des banques de détail devient un véritable enjeu. Le risque opérationnel, peu impacté par le contexte économique, est le moins coûteux à résorber. Par ailleurs, la banque de détail est entrée dans une période de transformation importante de son positionnement client et de ses processus de gestion de la relation client. La banque doit donc saisir l’opportunité de ces transformations pour investir dans des processus et outils innovants qui lui permettront d’assurer un suivi en temps réel de ses risques en adéquation avec ses nouvelles pratiques commerciales et son organisation : Mobile, flexible, connecté en un mot digital.